
Bien mauvaise nouvelle hier, apprise en bavardant avec Ahmed, un ami algérien sur facebook (il n'y a pas de bon ou de mauvais média pour apprendre les mauvaises nouvelles), l'Ami Said est mort cette semaine, et comme une mauvaise nouvelle ne vient jamais seule, il est même déjà enterré.
Je l'ai appris trop tard pour pouvoir être présente en pensée ou en fleurs. Je demanderai à quelqu'un d'aller mettre des roses jaunes sur sa tombe puisque, comme il me l'avait dit un jour, la symbolique des fleurs, c'est de la gnognotte, qu'est-ce qu'elle a fait au Quidam qui a inventé cette fichue symbolique pour mériter cette sale réputation? On dit en effet que le jaune est la couleur du luxe, de la gloire, du succès mais aussi de l'infidélité et de la trahison.

Ami Said, je l'ai rencontré lors d'un voyage en Algérie en 2002, revu en 2006 lors d'une seconde visite et entre temps de beaux échanges épistolaires parce que l'internet c'était pas son truc. En 2007 dans une lettre il m'écrivait sur le bénévolat parce qu'il était militant dans une association, celle qui nous a fait nous rencontrer :
"Au niveau des association le mal est partout le même, le bénévolat tend à disparaître de plus en plus. Le monde, à tort ou à raison, est devenu calculateur. remarque que s'il n'y a que toi qui donnes, que recevras tu donc? les mercis, les bisous, les belles paroles, on en a le cul cousu ! Ca ne mange pas de pain ! Pourtant il reste enfoui en soi une satisfaction réelle, celle d'avoir eu l'occasion de tendre la paluche, de distribuer quelques sourires et d'avoir fait quelques heureux de temps à autre."
Si je cite ce passage, c'est pour me rappeler, à moi et à ceux qui l'ont connu à quel point chez lui langue et militance ne faisaient qu'un. C'est assez rare. Je me souviendrais longtemps de notre première conversation quand après quelques sorties de vocabulaire de Ami Said, dignes de certains écrits de San Antonio au niveau du langage, je lui demande depuis combien de temps il a été en France, et il me répond qu'il n'y a jamais mis les pieds ! Jamais, je n'en revenais pas. Que quelqu'un puisse maîtriser à ce point toutes ces expressions fleuries que je n'ai que rarement entendues dans la bouche d'étrangers! C'est surement là où j'ai compris qu'entre algériens de la génération de Said et français, il n'y a pas de notion étrangère, au contraire, l'autre est plus soi qu'ailleurs.
Et le reste, cette sensibilité si rare et cet intelligence qu'il avait de la vie. Ces crises de fou rire partagées, entre autre, celle du fond du bus entre Bejaïa et Alger, on a failli y passer d'ailleurs car notre chauffeur fatigué avait pris la quatre fois en sens inverse, rien que cela ! Tout le monde, enfin ceux qui ne dormaient pas, était morts de trouille dans le bus et nous, et bien, on rigolait n'ayant rien vu de tout ce mic-mac sur la route ! Je me ne souviens plus bien du pourquoi de la crise de fou rire, quoique, cela avait peut-être à voir avec des méthodes de drague algériennes et/ou françaises !

Un jour parce qu'un de ses amis proche était mort subitement, Ami Said m'a écrit : "les gens qui ont vraiment compté pour toi ne sont jamais loin.". J'ai redit cette phrase hier à Ahmed qui était encore plus proche que moi de Ami Said.

A Ami Said donc, qui n'est pas si loin que cela aujourd'hui. Une chanson qu'il aimait et que j'apprécie aussi beaucoup.
IDIR EN CONCERT A AVA NOUVATkhilek lliyin tabburt
A Vava Inouva
Tchenchen tizzebgatin
im A yelli Ghriba
Uggadegh lwahch lghaba
A baba inouva
Uggadegh ula d nekkini A yelli Griba
Amghar yenttel deg bernus
Di tesga la yezzizzin
Mmis yethabber i lqut
Ussan deg wqerrus tezzin
Tislit deffir uzzetta
tessalay tijebeddin
Arrac zzind i temghart
Asen tesgher tiqdimin
Adfel yessud tibbura
Tuggi kecment s-ihlulen
Tajmaât tetsarju tafsut
Aggur d yitran hejben
Mad aqejmur n tasaft
Idgger akin idenyen
Mmlalend akw ayt wexxam
I-tmachahut ad sslen
Traduction des Paroles:
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Je t'en prie père Inouba ouvre-moi la porte
O fille Ghriba fais tinter tes bracelets
Je crains l'ogre de la forêt père Inouba
O fille Ghriba je le crains aussi.
Le vieux enroulé dans son burnous
A l'écart se chauffe
Son fils soucieux de gagne pain
Passe en revue les jours du lendemain
La bru derrière le métier à tisser
Sans cesse remonte les tendeurs
Les enfants autour de la vieille
S'instruisent des choses d'antan
Je t'en prie père Inouba ouvre-moi la porte
O fille Ghriba fais tinter tes bracelets
Je crains l'ogre de la forêt père Inouba
O fille Ghriba je le crains aussi
La neige s'est entassée contre la porte
L'"ihlulen" bout dans la marmite
La tajmaât rêve déjà au printemps
La lune et les étoiles demeurent claustrées
La bûche de chêne remplace les claies
La famille rassemblée
Prête l'oreille au conte
Je t'en prie père Inouba ouvre-moi la porte
O fille Ghriba fais tinter tes bracelets
Je crains l'ogre de la forêt père Inouba
O fille Ghriba je le crains aussi